Des tapis anciens, des plats à pastilla, du zellige, du zouac, du bejmat,… Un inventaire à la Prévert ? Non, seulement quelques-une des merveilles qu’un couple de Français installé au Maroc depuis une quinzaine d’années à rassemblé pour faire de sa maison une villa mauresque.
Stylisme Nathalie L
Texte Valérie TAZI
Photos M. Photos
Entre terre et mer, cette grande maison de famille qui se dresse, telle une vigie, sur la rive de l’oued Nefifikh, à Mohammedia, est un hommage à ce que l’artisanat marocain offre de plus beau. Inspirée par une villa de la Côte d’Azur et par les livres d’André Paccard (le double volume « Le Maroc et l’artisanat traditionnel Islamique dans l’architecture » publié en 1979) elle célèbre le mariage du style marocain et du style provençal. Avec ses façades blanches, ses tours et ses crénelures, elle affiche un caractère très marqué emprunté à la Villa Mauresque construite en 1860 par l’architecte Chapoulard à Saint Raphaël, sur la Riviera française. Passionné de dessin le maître des lieux a conçu toutes les façades. Un architecte a pris en charge la construction et la détermination des volumes. La propriétaire s’est occupée de la décoration intérieure. « Je voulais que l’on retrouve dans cette maison plusieurs échantillons de l’artisanat marocain : zelliges, zouac, plâtre sculpté,… On a beaucoup travaillé avec les livres de Paccard et avec des artisans de Meknès, de Marrakech et de Mohammedia qui ont été formidables » explique-t-elle. Résultat : Une maison qui explore les infinies possibilités du savoir-faire des Maâlems.
Tout s’organise autour du patio, véritable puits de lumière, digne des anciennes demeures fassies avec son bejmat, ses portes chinées à Meknès et Tétouan et sa fontaine en marbre. Il dessert une salle à manger, un petit salon marocain et un grand salon qui donne sur la terrasse, avec la mer comme horizon.
La propriétaire des lieux affiche sa passion pour les tapis jusque sur les murs du salon. Mobilier et objets chinés dans les souks et chez les antiquaires et meubles de famille venus de France se télescopent avec bonheur. Les fauteuils anciens tapissés de tissu fleuri se mêlent harmonieusement aux fauteuils en bois et cuir de Meknès et aux petites tables zouaquées. Sur les murs sont accrochés d’anciens plats à pastilla chinés à Fès et ailleurs. Les lustres en cristal viennent aussi du Maroc.
Dans la salle à manger, une armoire Louis XIII et des tableaux dans de beaux cadres dorés cohabitent avec un plafond en gebs. Sur une petit table est rassemblée une jolie collection de bols à soupe avec couvercles fabriqués en France pour le Maghreb.
Service de table 36 pièces Médard de Noblat chez Nuances Maison 18350 dh • Chandelier en verre Nuances Maison 3900 dh
Carafe Nuances Maison • Centre de table carré en verre et maillechort Villa Houda 340 dh • Nappe Antalya 400 dh
Théière or Mariage Frères chez Nuances Maison 4500 dh
La cuisine qui donne sur le potager et la terrasse est dans le plus pur style provençal avec ses carreaux jaunes, rouges et verts, sa grande table et ses placards ouverts qui laissent voir la vaisselle. Une jolie collection de siphons anciens en verre coloré et gravé trône sur une étagère.
C’est sur une terrasse couverte à l’abri du vent et donnant sur la piscine en zelliges verts (qui s’harmonisent avec l’oued) que la famille prend ses repas. Un petit muret en bejmat cassé sépare la terrasse du jardin potager où la propriétaire cultive betteraves, poivrons, salades et plantes aromatiques. L’oued en contrebas et la mer au second plan constituent un panorama de carte postale parfois troublé par des troupeaux de moutons qui viennent brouter l’herbe grasse.
La terrasse fait le tour de la maison offrant des coins distincts où l’on s’installe en fonction du moment de la journée. Les grilles en fer forgé peintes en blanc ont été dessinées par la propriétaire.
Le sol est un concentré d’artisanat : carreaux de ciment, zellige et bejmat.
Les chambres qui ont été faites pour les garçons de la famille sont simples. Dans la bleue, on retrouve la touche marocaine dans les carreaux de ciment et les portes de placards anciennes et zouaquées.
La chambre d’amis avec son ciel de lit en zouac et cuivre ouvragé qui laisse filtrer une douce lumière est plus sophistiquée. Le sol est un mélange de bejmat et carreaux de ciment. Les portes de placard en bois ont été chinées à Marrakech, décapées puis zouaquées.
Construite il y a trois ans, cette maison semble faire partie du paysage depuis toujours. Elle rappelle, avec nostalgie, les demeures de nos grand-parent. C’est une invitation à voyager dans le Maroc des Maâlems. Ce Maroc que nous avons parfois tendance à reléguer pour rechercher une modernité qui nous fait oublier que nous avons un patrimoine inestimable et des savoir-faire ancestraux qu’il faut préserver pour qu’ils ne se perdent pas.