
À Marrakech, Hamza Rachad développe un langage architectural précis, entre geste contemporain et savoir-faire artisanal. Son approche rigoureuse et sensible donne naissance à des intérieurs maîtrisés, où les matières dessinent l’espace autant qu’elles le révèlent. Entre géométrie contrôlée, textures vibrantes et dialogues subtils, ses projets incarnent une architecture exigeante, à échelle humaine et sans démonstration.
@studiorachad
La structure avant la forme
Dans les projets d’Hamza Rachad, l’espace se construit par strates. Toute intervention semble issue d’un processus lent, presque méditatif, où la structure prime sur la forme apparente. Les volumes ne s’imposent jamais : ils s’organisent avec précision, dans un jeu d’équilibre maîtrisé entre tensions orthogonales, lignes courbes contenues, et vides intentionnels. Les murs ne sont jamais réduits à des cloisons ; ils participent à une partition spatiale où le rythme architectural s’accorde au mouvement du corps.
Rachad puise dans une grammaire architecturale rigoureuse où l’échelle humaine est constamment interrogée. Le seuil, la hauteur libre, la profondeur des baies ou encore le retrait d’un socle deviennent autant de micro-gestes qui produisent du sens. La lumière naturelle y est toujours dirigée, canalisée, parfois filtrée. Elle révèle la texture d’un enduit minéral, souligne la densité d’un bois huilé, ou vient glisser sur un mobilier à l’angle adouci.
La rigueur comme signature
Cette architecture intérieure exigeante trouve son prolongement dans sa marque de mobilier, RACHAD™. Là encore, pas de geste gratuit. Les pièces, toutes conçues à partir de volumes élémentaires, jouent avec la géométrie sans jamais tomber dans le maniérisme. L’extrusion, la coupe oblique, le galbe réduit à l’essentiel donnent naissance à une série cohérente d’objets, à la fois fonctionnels et sculpturaux. Les lignes sont franches, les finitions assumées : aucune volonté décorative, mais une recherche d’évidence dans la forme.
Chez Rachad,
le détail ne s’ajoute pas…
Il oriente, il cadre, il construit le récit.
L’essence du local
Loin de céder à la tentation d’un artisanat folklorisé, Rachad articule une approche locale exigeante. Les matériaux sont sélectionnés non pour leur effet, mais pour leur capacité à réagir à la lumière, au toucher, à l’usage. Le marbre, le tadelakt, le bois brut, les pigments naturels… Tout est pensé pour dialoguer avec le climat de Marrakech, sa chaleur sèche, ses contrastes lumineux. La palette chromatique, réduite mais précise, s’ancre dans un vocabulaire de terre : argile, ocre, olive, charbon — toujours traités avec parcimonie.
Le détail comme discipline
Tout projet d’intérieur signé Rachad, qu’il s’agisse de restaurants, de boutiques, de bureaux ou d’hôtels, obéit à la même exigence de cohérence. Il ne s’agit pas de juxtaposer des matériaux nobles ou de multiplier les citations. Le projet s’élabore dans une économie de moyens, une discipline du détail, un refus des superpositions. Le mobilier ne s’ajoute pas à l’espace : il en découle. Il prolonge l’architecture en termes de masse, de matière, de dessin.
C’est dans cette rigueur que réside peut-être la singularité de sa démarche. À rebours des tendances tapageuses ou des effets de signature, Rachad travaille dans la continuité. Il ne produit pas des images, mais des lieux habitables, traversables, pensés pour durer. Cette position discrète, presque en retrait, s’inscrit pourtant avec force dans le paysage architectural marocain contemporain. Elle ouvre une voie possible : celle d’une modernité enracinée, sobre, mais conceptuellement solide.
À rebours des tendances tapageuses, il ne produit pas des images mais des lieux traversables, pensés pour durer.
Hamza Rachad, a signé plus de 150 projets en une décennie. Son studio, basé à Marrakech, fonctionne comme une cellule créative transversale : architecture, design, édition, conception d’espaces, production d’objets. Tout y est pensé dans une logique de chaîne courte et de fabrication maîtrisée. C’est cette vision systémique, à la fois créative et opérationnelle, qui permet aujourd’hui à son langage de se déployer avec constance.
Les formes se déduisent de la structure, les nuances naissent des usages — rien n’est laissé au hasard, tout est travaillé dans l’ombre du visible.