
L’édition 2025 de Design Shanghai l’a démontré avec une rigueur nouvelle. Plus de 600 marques venues de 30 pays, un visitorat de haut niveau, une scénographie lisible, et une distribution spatiale articulée autour de quatre axes: mobilier, matériaux, habitat, systèmes.
Le salon ne cherche plus à multiplier les effets. Il concentre, organise, découpe les usages et les catégories selon une logique constructive : celle de l’architecture, du détail, de l’application. Le mobilier y est présenté comme une strate : solide, modulaire, reproductible. Les cuisines et salles de bain fonctionnent comme systèmes globaux. Les matériaux sont montrés dans leurs états intermédiaires du brut à l’affiné. Même les objets lifestyle prennent place dans un récit plus technique, plus industriel, plus durable.
La présence des grands éditeurs européens s’inscrit ici dans un autre cadre. Non plus celui de la projection, mais de l’intégration. Car la Chine n’absorbe plus. Elle sélectionne. Elle structure. Elle redéfinit ses propres priorités en termes d’urbanisme, de logement, de standard domestique. À l’horizon 2030, le pays ambitionne la création d’une “ville du design” de classe mondiale, adossée à 20 centres industriels nationaux. Design Shanghai s’inscrit dans ce plan directeur, comme sa vitrine stratégique.
Notre regard s’ancre dans une double perspective : observer la mutation des scènes asiatiques depuis notre point de tangence africain, et identifier les zones de rencontre possibles entre systèmes industriels, matières premières, besoins urbains et cultures d’usage. Ce que nous avons vu à Shanghai cette année conforte cette lecture : les modèles s’hybrident, les priorités se déplacent, mais les exigences augmentent.
Design Shanghai 2025 propose une image nette, une scène qui ne cherche pas la fiction mais qui fabrique aec méthode, réseau et projection. Un design orienté production, pensé pour le logement, l’hospitalité, le territoire. Un design qui organise déjà ce qui vient.
Chaque section du salon applique une logique sectorielle précise : les matériaux se montrent en transition, les systèmes s’exposent dans leur continuité, les objets prennent place dans des mises en situation simples et efficaces. La présence de pôles comme Materials First ou Re:Materialize reflète une volonté de ramener le design à sa fonction première : produire. Non dans le sens d’un style, mais dans celui d’une transformation maîtrisée. Le design présenté agit à l’échelle du chantier, du lot, du projet à déployer. Tout repose sur la capacité à activer, à installer, à faire circuler.
Design Shanghai opère depuis une ville qui structure l’un des écosystèmes design les plus ambitieux au monde. Shanghai accueille plus de 200 000 studios actifs dans l’architecture, le design d’intérieur, la construction et l’aménagement urbain. Cette concentration s’inscrit dans une stratégie nationale tournée vers l’innovation, l’industrialisation créative et l’intégration des savoir-faire. À travers ce salon, la Chine affirme son ouverture sélective : elle accueille les marques internationales, les met en situation réelle, les connecte à un réseau dense de prescripteurs, développeurs, hôteliers, acheteurs spécialisés. L’international y trouve une plateforme lisible, structurée, connectée à un marché en transformation rapide — mais dont les codes se définissent de l’intérieur.
Depuis Casablanca, Déco Actuelle suit ce mouvement avec attention. En tant que seul média MENA officiellement présent cette année, notre lecture s’inscrit dans un réseau élargi — celui d’une presse spécialisée qui arpente les scènes de Milan, Paris, Cologne, Dubaï, Pékin.